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Faire découvrir aux étudiants les services écosystémiques des couverts végétaux

En 2022, les étudiants de BTS ACSE de la MFR de Granville ont participé aux travaux du groupe Dephy 
du Sud Manche, visant à mettre en place une plateforme de démonstration d’implantation de différents couverts végétaux dans le but de favoriser les services écosystémiques rendus.

Prélèvement de couverts végétaux par les étudiants BTS ACSE de la MFR de Granville pour détermination de la biomasse.
Prélèvement de couverts par les étudiants pour détermination de la biomasse.
© Réseaux Dephy Normands

Les étudiants de BTS ACSE ont été mobilisés dans les travaux du groupe Dephy du Sud Manche pour découvrir et comprendre les services écosystémiques des couverts végétaux.

Une situation gagnant-gagnant

La coopération entre les 11 agriculteurs du groupe Dephy du Sud Manche et les étudiants de la MFR de Granville a débuté en mai 2022 dans le cadre du projet CEGA (voir encadré). Les agriculteurs du groupe se posaient alors plusieurs questions sur les stratégies d’implantation des couverts végétaux entre un blé tendre d’hiver et un maïs, et notamment sur les outils à mobiliser et le choix des espèces. L’un d’eux indique : « D’ordinaire on met en place des couverts simplifiés de moutarde/trèfle ou de ray-grass italien en dérobée que l’on valorise ensuite en fourrage. Mais cette fois-ci on voulait essayer autre chose. C’était une bonne opportunité pour travailler avec la MFR de Granville ».
Pour les jeunes en formation agricole, c’est l’occasion de profiter d’un cas concret et d’appréhender la notion de couverts végétaux et leurs services écosystémiques, d’apprendre à distinguer les adventices des espèces cultivées dans le couvert et d’échanger avec les agriculteurs du groupe sur leur système, notamment sur l’agriculture de conservation des sols qu’ils pratiquent.

Le choix des mélanges de couverts

Les mélanges ont été sélectionnés par le groupe afin de maximiser les services rendus par le couvert, notamment la gestion des adventices estivales et automnales, mais aussi la production de biomasse et la restitution des éléments minéraux pour le maïs au printemps suivant. L’autre composante prise en compte est l’investissement dans le couvert. L’intérêt pour les agriculteurs est de savoir quel couvert permet le meilleur rapport entre le coût du couvert (semences et implantation) et les bénéfices rendus (vis-à-vis de la gestion des adventices, et de la restitution des éléments minéraux).
Ainsi trois couverts végétaux ont été sélectionnés pour répondre aux questionnements des agriculteurs selon trois stratégies d’implantation différentes. Les densités ont été ajustées afin de maximiser le nombre de pieds levés.
Le premier mélange se compose de phacélie (3 kg/ha), trèfle d’Alexandrie (1,5 kg/ha), trèfle incarnat (6 kg/ha).
Le second mélange assemble de l’avoine diploïde (25 kg/ha) et de la vesce commune (25 kg/ha).
Enfin, le troisième mélange réunit de la féverole de printemps (50 kg/ha), du sorgho fourrager (10 kg/ha), du trèfle squarrosum (8 kg/ha) et du trèfle incarnat (0,8 kg/ha).

Plusieurs stratégies d’implantation

Trois types de semis ont été choisis par les agriculteurs du groupe : le combiné de semis, le semis sur déchaumeur à dents et le semis direct à disques.
Les modalités d’implantation sont les suivantes :

  • combiné : déchaumage + semis au combiné ;
  • déchaumeur : déchaumage + déchaumage et semis au Delimbe ;
  • semis direct : semis direct sur chaume avec semoir à disques.

Toutes les modalités ont été suivies d’un passage de rouleau de type Cambridge afin de maximiser le contact sol/graine et la levée des couverts avec les conditions sèches de l’été 2022.
Cet essai, réalisé sur l’une des parcelles d’un agriculteur du groupe, se compose de grandes bandes de 9 à 12 m de largeur sur 100 m de long afin d’avoir suffisamment de matière pour observer des tendances (modalités non répétées). Le semis de toutes les modalités a été réalisé le 20 août 2022.

Accompagner les étudiants

La classe de BTS a été divisée en trois groupes, chacun ayant à réaliser le suivi d’un mélange.
Mais pour faciliter la compréhension et l’implication des étudiants dans ces travaux, plusieurs séquences de travail ont été organisées dès le printemps 2022.
« En mai on a commencé à travailler avec la MFR et les jeunes en présentant le projet du groupe Dephy, tout en rappelant des bases agronomiques, explique Simon Pesquet, animateur du groupe Dephy du Sud Manche. On les a également mobilisés en juin pour des visites d’essais et des échanges avec les agriculteurs sur le terrain. Et à l’automne, on a introduit des connaissances sur les couverts végétaux afin de préparer la première journée de relevé, axée sur la levée des couverts et qui s’est déroulée quelques jours après. »
« Le deuxième relevé terrain a eu lieu en novembre 2022, ajoute-t-il. Il a permis de déterminer la biomasse des couverts végétaux et de proposer une visite d’exploitation. La dernière partie a consisté à compiler et traiter les données en fin d’année, avant de rédiger une synthèse tout début 2023 (voir tableau en page 14). »

Taux de levée 

Plusieurs éléments clés ressortent de cet essai. 
Lors du premier relevé, on a rapidement constaté que le combiné de semis permet un contact sol/graine plus intéressant que les autres outils. De ce fait, la levée globale des couverts était plus régulière quel que soit le type de mélange. En revanche, cette préparation du lit de semence occasionne une levée des adventices plus importante que pour les autres outils utilisés. Les résultats pour le semis direct sont plutôt en dessous des attentes surtout en conditions sèches, mais ils sont peut-être liés aux réglages, suppose un agriculteur. « Lors de l’essai nous avons commencé par le troisième mélange pour le semis direct. Nous avons réglé le semoir plus profondément pour favoriser la levée de la féverole, le problème c’est que l’on a gardé le même réglage pour les autres couverts, du coup on a favorisé les grosses graines par rapport aux petites graines […]. On voit qu’il faudrait un semoir avec deux trémies afin de semer différents types de graines à différentes profondeurs. » 

Les plantes nitrophiles se distinguent 

Dans un second temps, les relevés de biomasse ont permis de mettre en évidence que le taux de levée des couverts n’est pas lié à une production de biomasse plus importante. En effet, l’outil permettant d’obtenir une biomasse plus importante est le semis au Delimbe monté sur déchaumeur à dents, et cela pour les trois mélanges. « Cette donnée est intéressante car la plupart des agriculteurs du groupe sont plutôt dans une optique de semer leur couvert, ou dérobée, avec un semoir combiné afin de soigner le semis et maximiser la biomasse. Or on s’aperçoit, avec les démonstrations, que le semis sur déchaumeur à dents est tout aussi intéressant et plus rapide dans le travail ! », ajoute Simon Pesquet.
C’est donc le premier mélange, composé de petites graines, semé au Delimbe sur déchaumeur qui présente la biomasse fraîche la plus importante avec 5,19 kg/m² et une valeur théorique de 5,9 tonnes de matière sèche. Cette biomasse est surtout liée à la phacélie, très productive dans ce mélange, avec à elle seule 4,9 kg/m² de biomasse fraîche mesurée. De même que pour le second mélange, on retrouve une forte proportion d’avoine diploïde, quasiment 2,5 kg/m² de biomasse fraîche et ce quel que soit l’outil utilisé. En revanche la vesce commune était très peu présente dans ce mélange.

Gestion des adventices 

On remarque une bonne gestion des adventices lorsque le couvert est bien développé, avec une biomasse importante, comme pour le premier mélange avec la modalité déchaumage. La gestion des adventices semble aussi efficace lorsque l’on ne travaille pas le sol : c’est ce que révèlent les modalités de semis direct pour le second et le troisième mélange. On suppose que les graines d’adventices ne sont pas remises en condition de germination et donc leur levée est limitée. Mais la meilleure modalité observée est celle avec l’avoine diploïde associée à la vesce commune qui présente une meilleure gestion des adventices. 
« L’avoine diploïde fait partie des espèces incontournables à semer dans les couverts, elle présente de nombreux avantages, y compris une forte compétition vis-à-vis des adventices. On peut supposer aussi que les reliquats azotés post-récolte importants cette année, liés au sec, ont pu lui être profitables », complète Simon Pesquet. Cependant il nuance. « Les relevés sont à remettre dans le contexte de l’essai. À ce stade, l’avoine pouvait être facilement confondue avec les repousses de blé ».

Semer un couvert : toujours bénéfique ! 

Le dernier élément déterminant est le bénéfice apporté par un couvert végétal. Simon Pesquet précise qu’« au-delà des services écosystémiques rendus, l’objectif de ce projet était de démontrer, à la fois aux agriculteurs et aux étudiants, que prendre le temps de semer un couvert végétal était un investissement rentable, surtout dans un contexte où les prix des intrants explosent ». 
Après avoir repris les données des relevés de biomasse dans la calculette “Merci” (Méthode d’estimation des restitutions par les cultures intermédiaires), disponible en ligne sur le site https://methode-merci.fr/, les étudiants ont pu réaliser le calcul des bénéfices des couverts végétaux en économie d’engrais pour le maïs suivant. 
Selon les couverts, les quantités d’éléments restitués peuvent être importantes, notamment pour l’azote et le potassium. Avec ces données, les étudiants ont chiffré le gain économique du couvert en fonction des prix actuels des engrais. 
Ainsi les gains théoriques peuvent être non négligeables. Un couvert à bas coût implanté au déchaumeur peut rapporter à l’agriculteur plus de 270 €/ha ! « Il était important d’avoir ces données chiffrées, même en théorie pour sensibiliser le groupe. On observe concrètement que des économies peuvent être réalisées ; c’est ce que l’on va travailler par la suite ».

Ce que retiennent les étudiants

Sur plusieurs mois de suivi et d’accompagnement, les retours des étudiants sont divers et variés, la plupart retiennent les bases agronomiques acquises lors du projet. « Je retiens comment faire son couvert, savoir reconnaître diverses plantes » ; « les différentes notions par rapport aux adventices » ; « des notions biotechniques, comme compter les plantes et savoir les différencier » ; « j’ai pu découvrir le nom des outils, comment limiter les phytos et à quoi servent les couverts végétaux ».
Le projet a également mis en évidence les difficultés de certains étudiants de travailler sur une thématique technique, parfois éloignée de leur centre d’intérêt ou de leur spécialité : « Simon a réussi à rendre un sujet qui ne m’intéressait pas en quelque chose d’assez ludique, j’ai appris des choses ».
« Le transfert de connaissances vers les étudiants est essentiel pour valoriser et mettre en évidence ce qui est fait dans les collectifs d’agriculteurs […]. Avec ce projet, conclut l’ingénieur réseau, je sais que les étudiants ne retiendront pas tout, mais ils savent désormais ce qu’est un groupe Dephy, ce que représente la réduction phytos et ont acquis un levier technique avec l’implantation des couverts végétaux. C’est primordial de continuer ce travail, ce sont les futurs conseillers, agriculteurs et acteurs du monde agricole. C’est important qu’ils entrent dans leur activité professionnelle avec ces notions ».

Retrouvez l’ensemble des données de l’essai sur le site : 
https://normandiemaine.cerfrance.fr/arad2/

Projet CEGA

Le projet de coopération entre l’enseignement et les groupes en agroécologie (ou “projet CEGA”) est un projet régional qui consiste à créer des espaces de réflexion et de partage, favorables à l’apprentissage permanent, tant pour les jeunes en formation que pour les agriculteurs impliqués dans les groupes.
Constatant qu’il n’est pas toujours aisé de faire travailler des étudiants sur des cas concrets d’agroécologie durant leur formation initiale, ce projet vise à faire se rapprocher les établissements d’enseignement agricoles et les collectifs d’agriculteurs labellisés par l’État, comme les GIEE ou les groupes Dephy Écophyto.
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