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Préservation et qualité de la ressource hydrique normande

Organisée dans le cadre du Contrat d'objectif 3 financé par la Région Normandie, une matinée d'échanges s'est déroulée le 10 décembre au lycée d'Yvetot autour de la gestion de la ressource en eau. Ce programme multipartenaire est mené pour faire évoluer l'agroécologie en Normandie.

En 2023, un projet pédagogique s'est mis en place au lycée agricole d'Yvetot, ayant pour objectif la sensibilisation des apprenants à la ressource en eau dans un territoire sensible. Ce projet a comme support une zone tampon humide artificielle qui se situe sur le parcellaire de l'exploitation agricole du lycée, créée en 2016.
En 2023, un projet pédagogique s'est mis en place au lycée agricole d'Yvetot, ayant pour objectif la sensibilisation des apprenants à la ressource en eau dans un territoire sensible. Ce projet a comme support une zone tampon humide artificielle qui se situe sur le parcellaire de l'exploitation agricole du lycée, créée en 2016.
© Lycée agricole d'Yvetot

Le réseau des Civam normands, en partenariat avec la Chambre d'agriculture de Normandie, Bio en Normandie, la Fédération des Cuma Normandie, l'Ardear, l'Astradhor et le Sileban, a organisé une matinée d'échanges sur la gestion de la ressource en eau au lycée agricole d'Yvetot le 10 décembre 2024. " Les agriculteurs ont un rôle plus que primordial. Ils ont une responsabilité par rapport à l'eau", a introduit Anthony Lebouteiller, membre du bureau des Civam normands et éleveur laitier dans la Manche.

L'agence de l'eau Seine Normandie a été invitée à faire un état des lieux de la qualité de l'eau en Normandie avec un focus sur la problématique pesticide. 

30 % des eaux souterraines sont en bon état chimique

Un inventaire de l'état chimique des masses d'eau souterraines en Normandie réalisé en 2019, met en avant que 72 % d'entre elles étaient en mauvais état. Ce même travail effectué actuellement montre que la situation s'est très peu améliorée.

Cette progression modeste s'explique par une forte inertie de ces milieux : sur la partie est de la Normandie, les roches aquifères (roches réservoirs d'eau) ont la capacité de stocker une grande quantité d'eau. C'est intéressant pour la production d'eau potable ; il y a une grande inertie de ses aquifères avec des temps de transfert des polluants assez longs de la surface jusqu'à la nappe, d'une trentaine d'années jusqu'à 50 ans sur certaines parties du territoire. Revenir à une qualité conforme est donc très long. On ne voit pas immédiatement les répercussions des changements de pratiques agricoles sur la qualité de la ressource.

Sur la partie ouest de la Normandie, on trouve plutôt des quartz qui ont des capacités de stockage d'eau plus réduite. En revanche, en termes de qualité, ce sont des sols plus réactifs aussi bien dans le positif que dans le négatif.

Le problème des métabolites

Quand on évoque la pollution par les pesticides, il faut plutôt parler des métabolites qui sont les produits de dégradation des pesticides. Il y a environ 4 000 molécules utilisées dans l'Union européenne et chacune contient entre 15 à 20 métabolites. Les métabolites présentent une grande mobilité et une grande persistance, menaçant la qualité de la ressource en eau. Les métabolites dits pertinents sont ceux qui ont une activité pesticide et des propriétés toxicologiques. Leur caractérisation, gérée par l'Anses (Agence nationale de santé sanitaire), a seulement commencé en 2019. Pour chaque métabolite pertinent, la limite de qualité établie par la directive européenne s'applique (0,1 microgramme par litre) et si le seuil est dépassé, la consommation de l'eau peut entraîner un risque pour la santé du consommateur. Il y a de plus en plus de métabolites mesurés à plus 0,1 microgramme par litre.

De gros investissements dans le traitement de l'eau

De plus en plus de contaminations dues aux métabolites sont constatées. Mais pour le moment, l'agence de l'eau ne suit régulièrement qu'une vingtaine de métabolites pour plus de 400 connues. Tout cela rend difficile l'adaptation des dispositifs de traitement. Un récent bilan sur les contaminations en matière d'eau distribuée en Seine-Maritime n'est pas réjouissant. 78 % de la population du département est concernée par une eau non conforme.

Aujourd'hui, 54 % des captages de Seine-Maritime disposent d'une solution de traitement qui limite la problématique au niveau de la distribution. Les autres 46 % n'ont pas de solutions technologiques satisfaisantes à ce jour.

Pour quelques métabolites, les performances des unités de traitement sont intéressantes mais cela ne fonctionne pas pour 100 % des cas.

De gros investissements dans le traitement de l'eau sont nécessaires, entraînant des hausses de prix du mètre cube. Par exemple, sur le plateau du Neubourg, le prix de l'eau a augmenté de 40 % pour traiter des problématiques de métabolites, de phytosanitaires et de nitrates, avec des investissements à hauteur de 4 millions par an à partir de 2025.

Coût du curatif jusqu'à 87 fois le coût du préventif

En 2011, une étude de l'agence de l'eau a montré que le coût du curatif peut représenter jusqu'à 87 fois le coût du préventif pour le service d'eau potable ! Quelques agriculteurs sont venus témoigner de leurs pratiques : Franck Sagaert dont l'exploitation est située sur le captage du Robec a mis en place le sans labour en 1997 et travaille beaucoup sur les couverts. " Sur la zone de captage toutes les bétoires répertoriées sont protégées par des bandes enherbées, des plantations et des fascines ", explique l'agriculteur qui appartient à un groupe Dephy.

En termes de nitrates, l'évolution du climat vers des hausses de températures va augmenter la minéralisation dans les sols et donc produire plus de nitrates avec des risques de lessivages plus élevés, dus aux pluies annoncées plus abondantes durant l'hiver.

Joris Soenen est installé en polyculture-élevage bio dans l'Eure sur le bac du Tremblay- Omonville. " Les seuils de nitrates ont été dépassés sur cette zone située sur le plateau du Neubourg. Sur le bac nous sommes incités financièrement à réduire nos reliquats entrée hiver, entre 50 et 60 unités, pour diminuer les taux de nitrates dans les sols et avoir un seuil de potabilité acceptable dans 30 ans. 80 % des surfaces sont engagées dans ce volontariat ".

" Ce que l'on fait aujourd'hui c'est pour 2050 "

Le jeune exploitant explique que c'est plus ou moins compliqué selon les précédents : entre deux céréales les objectifs de reliquat entrée hiver étaient atteints, mais seulement 10 % derrière un colza. " Ce qui marche bien c'est le couvert avant culture de printemps avec 75 % de réussite. Les seuils de potabilité ayant été dépassés, nous allons donc avoir un PSE (paiement pour services environnementaux) encore plus strict sur les reliquats entrée hiver et un volet sur la réduction de pesticides. La sortie de la prairie pour faire du blé est importante à gérer : quand on casse la prairie très tôt en juillet-août, on arrive à des taux de 250 unités entrée hiver. Quand on la détruit en octobre, on divise presque par deux les reliquats entrée hiver. À l'avenir, je vais sûrement faire un blé de printemps pour casser au printemps et essayer d'avoir un maximum de reliquat pour le blé et non pour la nappe. Il faut vraiment faire du préventif car il se passe 30 ans entre ce que l'on met sur les parcelles et le moment où cela arrive dans la nappe. Ce que l'on fait aujourd'hui c'est pour 2050. Les couverts sont un super outil pour l'élevage pour diversifier la ration des animaux et pour la culture suivante ".•

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