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La formation continue des salariés

Entre obligations réglementaires, exigences techniques et attentes croissantes des salariés en matière d’évolution professionnelle, le développement des compétences apparaît comme un enjeu central dans les entreprises agricoles. Pourtant, la formation n’est pas encore systématiquement intégrée comme un outil stratégique de gestion des ressources humaines.

Les résultats croisés des enquêtes “salariés” et “entreprises” montrent des écarts significatifs de perception et des différences de pratiques selon les secteurs et entreprises. En matière de formation continue des salariés, le secteur du paysage se distingue par sa régularité.
Les résultats des enquêtes sont unanimes. La formation des salariés est un sujet présent dans les entreprises agricoles, mais son recours est occasionnel. Si les employeurs affirment très largement envoyer ponctuellement leur salarié en formation (339 employeurs en élevage, 95 dans les services (ETA, groupements d’employeurs...), et 129 en production végétale), l’évidence est moins marquée chez les salariés. Certes, ils déclarent participer de façon occasionnelle à des formations mais une part importante indique n’y avoir jamais accès (en élevage 66 réponses pour « occasionnel » et 54 pour « jamais » et en productions végétales 36 réponses pour « occasionnel » et 24 pour « jamais »).
Heureusement, quelques entreprises se différencient avec des pratiques exemplaires et une régularité dans la formation de leurs salariés. On note ainsi, en élevage, par exemple, 20 employeurs qui proposent une formation chaque année et 18 en production végétale. 
Bien que peu représenté dans cette étude, le secteur du paysage se distingue en déclarant organiser des formations chaque année. 
Le catalogue de formations d’Ocapiat en ligne et le catalogue de formations édité par les Chambres d’agriculture et les partenaires normands devraient faciliter l’accès au programme et au calendrier des formations. Malheureusement, force est de constater que cela n’est pas suffisant car d’autres freins s’exercent : appréhensions personnelles, préjugés sur la formation, coût, méconnaissance des aides, contraintes logistiques ou familiales, manque de temps… Autant de raisons qu’il serait prématuré de juger dans le cadre de notre enquête actuelle. Néanmoins, il est essentiel de rappeler que la formation demeure un levier clé de fidélisation et de montée en compétences pour tous les collaborateurs.
Des résultats contrastés qui peuvent s’expliquer par des salariés peu demandeurs de formation ou des employeurs trop prescriptifs.

Des résultats contrastés qui peuvent s’expliquer par des salariés peu demandeurs de formation ou des employeurs trop prescriptifs.

Du côté des employeurs, la majorité des réponses évoque une co-construction conjointe du plan de formation avec les salariés, et ce, quelle que soit la filière (313 réponses en élevage, 80 dans les services et 117 en production végétale).
Les salariés confirment partiellement cette approche collaborative. Toutefois, une majorité d’entre eux perçoit la formation comme une démarche descendante, initiée principalement par l’entreprise. Ainsi, 41 salariés en élevage, 10 dans les services, et 31 en production végétale estiment que les formations sont proposées à l’initiative exclusive de l’employeur. Cette tendance se retrouve également dans le secteur du paysage. À noter, aucun salarié répondant à cette enquête n’a évoqué avoir été à l’origine de la demande de formation. Pourtant, quelques employeurs ont évoqué cette possibilité et y ont répondu favorablement. 
La décision du départ en formation et le choix de la formation semblent être des sujets de discussion. Manque de motivation du salarié ou peur du refus de l’employeur, difficile d’avancer une hypothèse mais il semble qu’y ait un défaut de communication entre employeurs et salariés sur ce sujet. 
La formation est d’abord une réponse aux exigences réglementaires mais aussi un outil pour progresser techniquement et prévenir les risques professionnels

La formation est d’abord une réponse aux exigences réglementaires mais aussi un outil pour progresser techniquement et prévenir les risques professionnels.

Le top 3 des formations dispensées aux salariés est incontestable et il est partagé entre salariés et employeurs. 

Des points de concordance salariés/employeurs

Un premier consensus clair se dégage autour des formations réglementaires (Certiphyto, Caces, permis, etc.), qui apparaissent comme un socle incontournable. Ce résultat traduit une bonne appropriation des obligations légales par les entreprises agricoles. La prescription de formation est renforcée par le caractère coercitif de la mesure. Elle explique en partie les résultats présentés précédemment sur l’origine de la demande de formation et le rôle de l’employeur dans le déclenchement du départ en formation.
Un second point de concordance se manifeste autour des formations techniques liées à l’exercice du métier, en particulier en élevage. Les entreprises y investissent fortement (266 en élevage, 72 en services et 94 en production végétale), et bien que les salariés soient moins nombreux à déclarer les avoir suivies (71 en élevage, 9 en services, et 21 en production végétale), ces formations restent la catégorie la plus fréquemment citée après les formations réglementaires. Cela témoigne d’une reconnaissance progressive de l’importance du développement des compétences techniques, même si l’accès effectif peut encore être élargi.
Enfin, la santé et la sécurité au travail apparaissent comme un domaine transversal sur lequel employeurs et salariés convergent également. Les entreprises intègrent ce thème dans leur plan de formation (132 en élevage, 71 en végétal, 42 en services), et les salariés confirment son importance (25 en élevage, 22 en végétal, 8 en services). Ce consensus reflète une sensibilité croissante aux conditions de travail, qui, bien qu’encore en retrait par rapport aux formations réglementaires, tend à s’ancrer durablement dans les pratiques.•

Pourquoi investir dans la formation continue des salariés ?

Pour les employeurs, former les salariés, c’est miser sur l’efficacité, la polyvalence et la motivation. Un salarié formé est plus autonome, plus impliqué et capable de s’adapter aux nombreuses évolutions de son entreprise. C’est aussi une manière de valoriser les talents, de fidéliser les équipes et de renforcer la performance économique et sociale de l’exploitation. 
Ocapiat est l’opérateur de compétences (Opco) des salariés de la production agricole. Il permet une prise en charge partielle ou totale du coût de la formation. 
Votre contact pour vous accompagner dans vos démarches : Élise Diedhiou – elise.diedhiou@ocapiat.fr
Pascaline Bellier de Fromont – FRSEA Normandie
 

EMMA LENOËL, 27 ans, salariée du Gaec LV Lepage, élevage bovins lait – polyculture élevage à Domjean (Manche).

Développer à la fois des connaissances théoriques et des savoir-faire

Autrefois éducatrice spécialisée, j’ai souhaité me réorienter vers un métier plus proche de la nature et des animaux. Cette envie m’a conduite à effectuer un stage de deux mois dans un élevage bovin. Ce fut une révélation. C’est à la suite de cette expérience que j’ai découvert la formation POEC (Préparation opérationnelle à l’emploi collective) agent d’élevage laitier.
Même si la formation ne semblait pas, au départ, taillée pour les profils en reconversion, j’ai eu la chance d’être acceptée. Je partais de zéro, sans aucune base technique, mais avec une forte motivation pour apprendre. Je cherchais à acquérir des compétences concrètes et à gagner en légitimité dans ce nouveau secteur.
Le POEC m’a permis de développer à la fois des connaissances théoriques et des savoir-faire pratiques essentiels en élevage tels que la gestion et le tri des vaches dans le troupeau, le soin aux veaux (dont la buvée, la contention, la manutention), la gestion de l’alimentation, et même la conduite de matériel agricole. J’ai aussi appris à faire les premiers entretiens sur les machines (graissage, meulage, petites réparations)… Autant d’éléments indispensables pour être opérationnel sur le terrain. C’est une formation intense, mais extrêmement formatrice. 
Ce que j’ai particulièrement apprécié, c’est la richesse et la diversité de la formation. Nous avons visité plusieurs types d’exploitations laitières, chacune avec ses spécificités techniques. Comme une installation avec un robot de traite, une salle de traite en roto/manège, ou une salle de traite classique. Nous avons donc pu échanger en profondeur avec les éleveurs sur leurs choix, leurs essais, leurs doutes et leur vision de l’avenir. Ces moments d’échanges ont réellement enrichi notre compréhension du métier.
Un point qui mériterait d’être renforcé selon moi est le temps passé sur la ferme pédagogique du lycée. Être confronté seule à une situation réelle comme une vache coincée, un incident de traite ou une panne, permet de développer des réflexes qu’on n’apprend pas dans un cours. C’est dans ces moments-là qu’on gagne vraiment en assurance.
Malgré cela, nous avons eu la chance d’être un groupe très investi, ce qui nous a permis de pousser la formation au-delà du programme de base. Et ce niveau d’implication a été payant. 
À l’issue du POEC, j’ai été embauchée immédiatement. Aujourd’hui, je suis salariée agricole polyvalente dans une ferme laitière, le Gaec LV Lepage. Ce métier est très varié, stimulant et me correspond pleinement. Après seulement un mois sur mon nouveau poste, j’avais déjà trouvé mes repères. Je suis désormais épanouie dans mon travail et je sais que j’ai trouvé ma voie. Grâce au POEC, j’ai pu concrétiser ma reconversion et construire un projet professionnel qui a du sens.
Propos recueillis par Marc Lemonnier, Can


Dans le cadre du Contrat d’objectifs porté par la Région Normandie sur le thème de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), l’Association des salariés agricoles de Normandie, la Chambre d’agriculture de Normandie, EDT Normandie, la FRSEA Normandie, l’UNEP, Activ’Emploi ainsi que l’Anefa ont conduit des enquêtes pour mieux comprendre les attentes des salariés vis-à-vis de leur emploi et de leurs employeurs, ainsi que celles des employeurs envers leurs salariés.

Ces enquêtes s’appuient sur les réponses de 151 salariés et de 574 employeurs, représentant à eux seuls 2 664 salariés.

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