Terre de Lin : « On sait où on veut aller »
L'assemblée générale de Terre de Lin qui se tient tous les ans est toujours un grand rendez-vous. La coopérative revient sur la campagne passée, l'état du marché et ses prévisions économiques.
L'assemblée générale de Terre de Lin qui se tient tous les ans est toujours un grand rendez-vous. La coopérative revient sur la campagne passée, l'état du marché et ses prévisions économiques.
Terre de Lin a réuni ses adhérents pour son assemblée générale le 6 février à Yvetot sous la présidence de Guillaume Hemeryck. Elle fêtera ses 25 ans le 4 juillet prochain à Saint-Pierre-le-Viger. Tous les adhérents sont invités à participer à cet événement durant lequel sera présenté le nouveau projet d'entreprise qui a été mis dans les mains des jeunes adhérents.
Mauvaises récoltes mais belles recettes
L'assemblée a débuté par le bilan de la campagne 2023/2024 qui se caractérise par de mauvais rendements : 5,4 tonnes de paille à l'hectare et 980 kg à l'hectare de lin teillé. Malgré cette mauvaise année technique, la recette des liniculteurs atteindra en moyenne les 7 500 euros/ha pour le lin de printemps. À noter que la récolte 2023 de lin d'hiver a été exceptionnelle en qualité et quantité.
Le chiffre d'affaires de la coopérative s'élève à 223 M€ d'euros contre 162 M€ pour la campagne précédente. La rémunération des adhérents s'élève à 163 M€. Le résultat reste identique à 820 000 euros. Avec 46 M€, le fonds de roulement a fait un bond. " En accord avec sa politique de financement, la coopérative n'a pas d'emprunts. Le conseil d'administration veut garder de la disponibilité pour avoir les moyens de stocker des fibres si besoin. Au vu du chiffre d'affaires, les provisions sont de 29 M€ contre 18 M€ pour l'exercice précédent ", a précisé Sébastien Vandenbulcke, responsable production gestion chez Terre de Lin. Pour la coopérative et ses filiales (Tex Nord, TDL Technique, Terre de Lin Développement), le chiffre d'affaires consolidé est de 410 M€ et le résultat de 1,60 M€.
Un retour à la normale en 2024
Le directeur Thierry Goujon a ensuite donné les perspectives de la campagne 2024/2025 en cours :
Pour le moment, seulement 15 % de la récolte 2024 a été teillée mais les premiers résultats techniques donnent une moyenne de 7,7 tonnes de paille et 1,7 tonne de lin teillé à l'hectare. " Nous sommes revenus à des chiffres techniques normaux mais la récolte 2024 ne se teille pas bien. Il y a beaucoup d'humidité. Pour les lins d'hiver, les résultats sont malheureusement en dessous de la moyenne 10 ans ".
Une contribution de tous au report
Pour début février 2026, toute la récolte 2024 devrait être teillée. Pour éviter de mettre une grosse production de fibres rapidement sur le marché, les coopérateurs ont été sollicités pour un report volontaire. " Avec ce stockage volontaire, nous couvrons une grosse partie de notre report mais cela ne sera pas suffisant. Il a donc été décidé de laisser chez tout le monde 20 à 25 % des surfaces pour que tous apportent leur contribution ", précise Thierry Goujon qui ajoute un point sur la récolte de semences : " La récolte de semences 2024 est importante mais nous avons quand même beaucoup de frustration. Les rendements étaient vraiment bons mais beaucoup de parcelles qui avaient le potentiel n'ont pas pu être récoltées en semences. Nous pourrons approvisionner nos adhérents et clients historiques, mais nous ne pourrons pas répondre à toute la demande qui est en hausse car les surfaces 2025 seront au moins égales à 2024, voire en hausse de 5 à 10 %, selon les zones ".
Terre de Lin poursuit évidemment son travail sur la création variétale avec de nouveaux numéros en cours d'inscription, qui sont plutôt orientés poids de paille. " Il nous faudra des variétés passe-partout qui poussent quand il fait sec et qui ne versent pas quand il pleut beaucoup ".
Un nouveau bâtiment de stockage
En ce qui concerne les investissements, le plus gros poste prévu cette année concerne un bâtiment de 6 000 m2 sur le site de Saint-Pierre-le-Viger, qui permettra de stocker des fibres. Au niveau du teillage, les investissements se poursuivent pour améliorer les conditions de dépoussiérage. Pour le matériel de récolte, quatre écapsuleuses, tant attendues, devraient arriver cette année. Enfin, maintenant que les volumes de lin d'hiver deviennent importants, des investissements vont également être réalisés cette année pour augmenter la capacité de la station de semences.
Tex Nord a relancé les affaires
Concernant le marché, le prix de vente est passé en dessous des 4 euros en décembre 2024 mais aujourd'hui la baisse est stoppée et les prix sont stables. " Dans une situation telle que nous l'avons connu en automne dernier, où tous les achats de fibres ont été stoppés, il a fallu aller se confronter au marché et nous avons vu que l'union fait la force. Fin novembre, Tex Nord, appuyée par Com Lin, a joué son rôle, en relançant les affaires et en stoppant la baisse des prix ".
Des acteurs du marché ont donné leur point de vue sur les perspectives de ventes : Frédéric Douchy qui dirige la holding belge Procotex, spécialisée dans le peignage, l'affinage et le négoce du lin, Bertrand Métivier, responsable commercial de Tex Nord, Willy Coucke, responsable des ventes et de la valorisation chez Terre de Lin et Daniel Liu, agent de Tex Nord sur le marché chinois. Tout le monde a souffert du prix et du manque de matière, aussi bien la Chine, l'Inde que l'Europe. Mais aujourd'hui, il y a chez les filateurs un désir de remettre leurs broches en route. Depuis que les prix ont baissé, les Indiens et les Chinois rebondissent.
Les clients souhaitent une stabilité
Le marché indien ouvre aussi de belles perspectives. L'inde a toujours eu la volonté d'investir dans de nouvelles broches bien que celle-ci ait été ralentie par le manque de matière première. En Inde c'est une fibre très bien perçue, il y a une bonne dynamique. En Chine, les industriels commandes des broches : de 30 à 50 000 broches sont prévues en 2025 et 2026 car la consommation locale augmente. Des marques chinoises se développent et mettent de plus en plus de lin dans leur collection.
Il faut être optimistes car les industriels ont besoin de reconstituer leurs stocks, pour répondre à la demande des consommateurs mais aussi pour retrouver une sécurité, ne sachant pas ce que donnera la récolte 2025. Il y a une bonne dynamique mais les acheteurs vont avoir besoin de stabilité tant dans les approvisionnements qu'en qualité pour reprendre leurs investissements." La demande est en croissance mais si on offre trop de matière, on ne pourra pas défendre nos prix. La gestion des prix est entre les mains des producteurs. Une moyenne de 4 euros le kilo de lin teillé semble tenable et pourra faire vivre tout le monde ", conclut Guillaume Hemeryck.•