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Les Chambres sommées de boucler leur régionalisation

Depuis la création de ce statut en 2022, seules cinq régions ont basculé dans le modèle de "Chambres d'agriculture de région", rappelle la Cour des comptes dans un rapport le 1er octobre. S'adressant à l'État, les Sages de la rue Cambon veulent renforcer le rôle de la tête de réseau Chambres d'agriculture France.

La Cour des comptes demande une régionalisation accélérée et une gouvernance plus rigoureuse des chambres d'agriculture.
La Cour des comptes demande une régionalisation accélérée et une gouvernance plus rigoureuse des chambres d'agriculture.
© Actuagri

Dans un rapport paru le 1er octobre, la Cour des comptes exhorte les Chambres d'agriculture à " organiser l'ensemble du réseau en Chambres de région dotées de Chambres territoriales " (en lieu et place des Chambres régionales et départementales). Seules cinq régions ont basculé dans ce modèle instauré par une ordonnance de janvier 2022. Pour rappel, les Chambres de région sont constituées par la fusion d'une Chambre régionale et des Chambres départementales qui en dépendent, lesquelles deviennent des assemblées d'élus dépourvues de personnalité juridique. Or, " le niveau départemental reste prépondérant et entrave souvent la régionalisation ", rappellent les Sages de la rue Cambon. Les magistrats veulent que la régionalisation soit finalisée " dans le délai du prochain COP " (contrat d'objectifs et de performances), que l'État et les Chambres doivent signer pour cette nouvelle mandature démarrée en début d'année. En particulier, la Cour a formulé un " rappel au droit " pour que le réseau consulaire et les pouvoirs publics mettent en œuvre la " régionalisation des services support " (juridique, administratif, comptabilité) prévue par un décret de mai 2016.

Une tête de réseau " insuffisamment respectée "

Par ailleurs, Chambres d'agriculture France (CDAF) est " insuffisamment outillée et respectée " aux yeux de la Cour des comptes. Elle est appelée à " faire respecter [son] pouvoir normatif ", en s'appuyant sur le pouvoir de sanction que lui octroie la récente loi d'orientation agricole (LOA). L'article 53 de la LOA confère à la tête de réseau de nombreuses missions pour le compte des Chambres (stratégie nationale, offre nationale de services, élaboration de normes, audits, etc.). Un décret d'application est " en cours d'élaboration " pour le mettre en musique, selon les Sages.

Dans sa réponse officielle au rapport, Chambres d'agriculture France insiste sur ce point, estimant que " seul le décret d'application pourrait éventuellement prévoir ce pouvoir de sanction ". Dans un communiqué du 1er octobre, CDAF salue le travail des Sages, qui " souligne [...] les progrès effectifs réalisés par le réseau ", selon elle. La tête de réseau évoque les progrès " restant à réaliser en particulier au niveau régional " et promet que " ces points pourront être intégrés dans le prochain COP [et] dans le nouveau dispositif de performance ". La Cour appelle aussi CDAF à prendre en main la répartition de la TATFNB, première source de financement du réseau. Autre chantier que la Cour des comptes veut voir avancer au niveau national : la négociation d'un " régime conventionnel commun aux salariés de l'ensemble du réseau ". Ce qui implique que le gouvernement fournisse à CDAF une " base législative ". Plus largement, la tutelle de l'État - sur les plans juridiques comme financier - est jugée " trop peu effective et efficace ". Un constat déjà fait par les magistrats en 2021 et " toujours d'actualité ".

Quant aux missions des Chambres, elles devraient être " recentrées sur quelques priorités autour de l'accompagnement des agriculteurs dans les transitions économiques, sanitaires et environnementales ". Les Sages demandent aux pouvoirs publics de " maîtriser l'expansion des missions de service public " confiées aux Chambres, comme l'installation et, à partir de 2026.

Besoin d'un meilleur cadre pour la probité des élus

Par ailleurs, la Cour des comptes recommande que les Chambres d'agriculture soient dotées de " normes relatives à la gouvernance [...] et au statut des élus pour la prévention et de sanction des atteintes à la probité " (infractions telles que la corruption ou les conflits d'intérêts). Les magistrats réclament que ce cadre soit édicté " dans un délai d'un an " par le décret d'application de la loi du 15 février 2025 portant sur la gouvernance des Chambres et de la MSA. Ce décret pourrait rendre obligatoire un modèle de règlement intérieur pour tous les échelons du réseau des Chambres. Les règles pourraient s'inspirer de la charte de déontologie établie en 2021 pour les élus de Chambres d'agriculture France (tête de réseau). Selon les Sages de la rue Cambon, l'organisation nationale a diffusé en mars 2025 un "modèle" issu de cette charte, " que les Chambres ont pour l'heure la liberté de prendre ou non en compte " dans leur règlement intérieur. Sans révéler de faits nouveaux, le rapport de la Cour des comptes évoque des " irrégularités régulièrement constatées " par ses magistrats en matière de gouvernance : décisions illégales faute d'atteinte du quorum, versements de subventions à un syndicat, ou encore " atteintes à la probité ". " Les contrôles de la Cour mettent régulièrement en évidence une confusion dans certaines sessions et certains bureaux de Chambres " entre fonctions syndicales et consulaires. Une pratique déjà pointée notamment en Corse. " Le mode d'élection des Chambres ne facilite pas la dissociation des responsabilités syndicales [...] et la conduite d'un établissement public ", analysent les Sages. Résultat : la Cour constate par exemple " l'adoption fréquente par les sessions des Chambres de motions hostiles à la réduction de l'usage des produits phytosanitaires directement inspirées des éléments de langage syndicaux ". Des positions qui contrecarrent les " politiques publiques que les Chambres doivent dans le même temps mettre en œuvre ".•

France Info dans le viseur des Chambres

Par l'intermédiaire de son président, Sébastien Windsor, Chambres d'Agriculture France (CDAF) prend acte des remarques de la Cour des comptes. Il souligne les " avancées notables " mises en œuvre " avec des moyens cependant limités ", souligne le communiqué de CDAF du 1er octobre et indique que les points de progression en particulier ceux à réaliser au niveau régional " pourront être intégrés dans le prochain COP dans le nouveau dispositif de performance ". Mais la colère est en revanche montée d'un cran, quand France Info a publié, sur son site, avant la diffusion du rapport de la Cour des comptes, un article intitulé " Corruption, favoritisme, décisions illégales... la Cour des comptes dénonce les dérives des Chambres d'agriculture ". L'usage des termes " corruption " et " favoritisme " en insinuant qu'ils ont été constatés au sein des Chambres d'agriculture par la Cour des comptes constitue une extrapolation qui dénature le sens de rapport. Ces termes " ne sont cités dans le rapport que comme des risques issus de la cartographie des risques en matière de corruption établie par le Comité d'audit de Chambres d'agriculture France ", précise le communiqué des Chambres. " Jeter l'opprobre sur nos établissements est une injure au travail réalisé au quotidien par nos collaborateurs pour accompagner les projets des agriculteurs et leur permettre de relever les défis dans un contexte économique et sanitaire difficile ", a tonné Sébastien Windsor.

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