Le courant passe mieux entre l’Etat et l’agriculture
Au Salon de l’agriculture, les pouvoirs publics ont multiplié les gestes, les contacts et les engagements envers la profession agricole représentée par le syndicalisme majoritaire Fnsea/JA.
Les pouvoirs publics craignaient un salon de tous les dangers. En fait, l’édition 2015 du salon international de l’agriculture aura été celui du dialogue et d’un certain apaisement. En tout cas entre les représentants de l’Etat et le syndicalisme majoritaire, Fnsea-JA.
Premier acte : le grand forum du 20 février sur la contribution de l’agriculture à la lutte contre le réchauffement climatique. Un événement qui a pu contribuer à inverser l’image de l’agriculture dans la société et surtout l’image que les agriculteurs ont d’eux-mêmes. Co-organisateur de la manifestation, la Fnsea a pu dialoguer au plus haut niveau avec les pouvoirs publics. Venu lui-même conclure les débats, le président de la République en a profité pour répondre sur des thèmes chers au syndicalisme majoritaire : oui à davantage de recherche sur l’agriculture ; oui à la simplification et à l’allègement des contraintes réglementaires. Deux demandes réitérées depuis des semaines par Xavier Beulin au nom de la Fnsea.
L'impératif économique
Le président de la République revenait sur les mêmes idées, le lendemain 21 février, lors de l’inauguration du salon. Plus d’une heure et demie de concertation avec les organisations syndicales, dans l’enceinte de l’Odyssée végétale, c’était du jamais vu. Une heure et demie suivie par une visite sur le stand du sucre où les principaux problèmes de la filière (fin des quotas, biocarburants, image du sucre) étaient abordés. Autant de dialogues et de visites que, le lundi suivant, le Premier ministre Manuel Valls puis Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, devaient prolonger. Impression dégagée : l’impératif économique, la compétitivité des exploitations agricoles pèse autant que le respect de l’environnement et compte plus que le maintien de la petite exploitation.
Le second acte, provoqué par le commissaire européen à l’agriculture, permettait justement de traduire dans les faits des revendications précises d’une partie des agriculteurs. Phil Hogan, dès son arrivée au salon de l’agriculture, le 22 février, annonçait que la Commission européenne lançait le processus de stockage privé du porc, de manière à soutenir les cours et les exportations, face aux conséquences de l’embargo russe sur le porc européen.
Autre mesure : le principe des couverts végétaux se voyait reconnu comme une des conditions au verdissement de la Pac, une revendication importante des producteurs de grandes cultures. Selon les trois présidents des organisations de producteurs de blé, maïs et oléo-protéagineux, les échanges avec le commissaire européen Phil Hogan au salon de l’agriculture ont «de nouveau montré que les producteurs de grandes cultures pouvaient être entendus comme des interlocuteurs responsables et porteurs de solutions originales pour allier intérêts économiques de l’exploitation et progression de la cause environnementale». Cela faisait bien longtemps que l’organisation des grandes cultures n’avait eu un tel motif de satisfaction.
Modèle agricole
Qu’il s’agisse du gouvernement français ou de la Commission européenne, l’un et l’autre semblaient donc reconnaître le modèle agricole prôné par le syndicalisme majoritaire. Une réalité en phase avec la politique générale du gouvernement, à l’heure d’une loi Macron qui vise à libérer les capacités de croissance des agents économiques. «Tout le monde reconnaît que la France doit se remettre dans le tempo européen», constate Xavier Beulin qui insiste sur «la perte d’influence actuelle de l’agriculture française». «On note une meilleure reconnaissance de l’intérêt que représente l’agriculture pour la France», affirme Guy Vasseur (Apca).
Innovation
Ces questions de revendication levées, le salon de l’agriculture 2015 devenait un salon tourné résolument vers l’innovation et l’agro-écologie. Initiatives public-privé sur le biocontrôle, collaborations entre instituts de recherche et coopératives (Inra-Agrial par exemple), initiatives pédagogiques sur l’agro-écologie ou sur le machinisme agricole (Lassale Beauvais), présentations de technologies nouvelles (utilisation des drones) ou, au Sima, de machines adaptées à des économies d’intrants… Le couple salon de l’agriculture-Sima s’apparentait à un lieu de réflexion et de travail sur les nouvelles technologies en agriculture et le rôle que celle-ci peut jouer dans la réduction des effets de serre. Un salon moins politique, en dépit de l’incroyable quantités de visites d’hommes et de femmes politiques, un salon plus studieux. exactement ce que désiraient les pouvoirs publics… à quelques semaines d’échéances électorales.