Hivernales AGPL : une récolte 2024 à gérer
Les perspectives du marché mondial du lin textile sont bonnes mais face à une récolte 2024 satisfaisante, l'AGPL, avec les teilleurs, demande le stockage de paille dans les fermes.
Les perspectives du marché mondial du lin textile sont bonnes mais face à une récolte 2024 satisfaisante, l'AGPL, avec les teilleurs, demande le stockage de paille dans les fermes.
Comme chaque année, les réunions hivernales de l'AGPL (Association générale des producteurs de lin) se sont déroulées sur les territoires liniers pour aller au plus près des producteurs de lin, leur apporter de l'information économique et technique.
Avant de faire un point sur la campagne 2024, l'AGPL a souhaité que Damien Durand, directeur économique de l'Alliance du lin et du chanvre européens, partage la vision globale de ce comité de promotion, sur les marchés et les tendances mondiales. " Le marché final veut du lin mais nous sortons d'une saison 2023-2024 compliquée. L'offre a été difficile, portée par les performances d'une récolte 2023 très faibles. Nous sortons d'une période difficile en matière de capacité à fournir le marché et le facteur le plus sensible reste la capacité de rendement à l'hectare. Pour la récolte 2024, à l'échelle française, on parle de 1,4 tonne de fibres longues à l'hectare. Avec une augmentation importante des surfaces semées en lin en 2024, nous sommes sur une hausse considérable de la production ", a-t-il expliqué.
Depuis début janvier, ce n'est que la récolte 2024 qui passe dans les teilleuses, et on peut s'attendre à avoir une production de 18 000 tonnes de fibres longues minimum par mois. " Après une forte année de pénurie, la filière européenne est à nouveau en mesure de répondre à la demande importante du marché. Des filatures et des broches de filatures continuent à s'installer dans le monde, en Chine, en Inde et en Europe : deux projets en France et au Portugal sont en cours de développement ".
Une classe moyenne asiatique qui consomme du lin
Concernant le marché final, Damien Durand a rappelé que le lin était présent sur tous les segments de marché avec une présence plus importante sur le luxe abordable. Mais il est également très présent dans la moyenne gamme (Uniqlo ou Zara). Le secteur du luxe reste un débouché, avec une croissance positive, mais n'est plus dans la situation considérable d'avant Covid pour les années à venir." L'évolution de la classe moyenne dans le monde est un des changements majeurs que nous sommes en train de connaître : elle a tendance à consommer la moyenne gamme mais a des exigences particulières en termes de traçabilité et de naturalité. À partir de 2030, elle sera très majoritairement asiatique : en Chine, en Inde, en Indonésie, au Vietnam, aux Philippines... Cette tendance est très suivie à l'observatoire économique du lin. 90 % de la production de fils fait avec de la fibre European Flax en Inde reste en Inde. Ces pays deviennent des lieux de consommation avec une capacité d'achat qui s'annonce dynamique et qui laisse espérer de bonnes perspectives pour l'évolution de la vente de produits en lin ".
Report de paille 2024 demandé aux liniculteurs
Le président de l'AGPL, Bertrand Gomart, est revenu sur la dernière campagne : " Depuis 3-4 ans, avec les incidents météorologiques, la production a baissé et nos stocks de paille ont fondu. La hausse de prix, conséquence de cette situation de pénurie, a permis de bonnes recettes. Mais les prix très élevés ont engendré une cassure et une perte de clients ". En octobre 2024, face à un prix moyen de 9 euros le kilo de lin teillé, tous les filateurs ont arrêté leurs achats. Sachant que la récolte 2024 s'annonçait bonne, ils ont fait le choix d'attendre que les stocks montent un peu. Les affaires ont repris depuis fin novembre, et aujourd'hui, les négociations se font aux alentours de 3,50 euros départ. " C'était le prix d'il y a 3-4 ans, ce qui nous permettait une rémunération correcte, avec des rendements corrects ", a-t-il précisé.
Pour la récolte 2024, avec 185 849 hectares, les trois pays producteurs ont atteint des records de surfaces. Le rendement paille est estimé à 6,6 tonnes à l'hectare et 1,3 tonne de fibres. L'apport en fibres longues sera donc important : 230 000 à 240 000 tonnes de lin teillé pour le marché mondial. C'est un record quand il est vendu en moyenne 150 000 tonnes depuis 10 ans. " Avec une prévision de teillage annoncée autour de 18 000 tonnes par mois, la production devrait être d'environ 150 000 tonnes fin juin 2025. À cette date, il devrait rester 90 00 tonnes pas encore teillées dans les fermes ". À ce jour, tous les teilleurs demandent aux producteurs de stocker une partie de leur paille dans leurs bâtiments, en report jusqu'à l'année prochaine.
Demande de stabilisation des surfaces pour 2025
" Si nous voulons absolument tout vendre, nous participerons à l'accélération de la baisse des prix. La négociation entre les vendeurs et les filateurs a commencé et tout le monde se serre les coudes pour maintenir un prix de 3,50 euros. À terme, nous sommes tous d'accord pour dire qu'un prix entre 3 et 6 euros pourrait être raisonnable par rapport à nos coûts de production ", a ajouté Bertrand Gomart qui est revenu sur l'intérêt du stockage : " aujourd'hui, quand un producteur stocke de la paille, cela lui coûte 10 centimes au kilo de lin teillé. Si nous décidons de forcer le teillage pour vendre, nous pouvons très vite perdre un euro du kilo. Je pense qu'il vaut mieux que chacun garde 20 à 30 % de son lin. Les 70 % qui seront vendus teillés vont financer le stockage ".
Pour 2025, le message de l'AGPL pour les semis de printemps est à la stabilisation. On parle malgré tout d'une hausse des surfaces entre 5 et 10 %. Mais les hausses risquent d'être limitées par la disponibilité en semences.•