Des robots dans les champs : sommes-nous vraiment prêts ?
Alors que la technologie avance à pas-de-géant, beaucoup de questions subsistent quant à la mise en œuvre, en conditions réelles, de la robotisation des travaux des champs. Les Cuma de l’Ouest et de Normandie se penchent sur la question.
Alors que la technologie avance à pas-de-géant, beaucoup de questions subsistent quant à la mise en œuvre, en conditions réelles, de la robotisation des travaux des champs. Les Cuma de l’Ouest et de Normandie se penchent sur la question.
Si la robotisation a gagné les élevages depuis plusieurs années maintenant, le pas reste à franchir en plaine. Pourtant, la technologie progresse aussi en grandes cultures, et commence à intriguer, voire à séduire. Toutefois, de nombreux points restent à éclaircir avant d’investir. C’est ce qui a conduit les Cuma de l’Ouest et de Normandie et leurs partenaires à créer un réseau d’échange autour de ce sujet. « C’est un sujet que nous étudions dans le cadre du partenariat européen pour l’innovation », explique Gauthier Savalle, conseiller agroéquipement à la Fédération des Cuma de Normandie.
Libérer du temps de main-d’œuvre
Pour commencer, il s’agit de faire un état des lieux des équipements automatisés existants ou en cours de développement et de le confronter aux besoins réels des agriculteurs normands et à leurs contraintes. À ce titre, une étude a été conduite par une équipe d’étudiants d’UniLaSalle auprès de 35 agriculteurs. Il en ressort qu’ils sont nombreux à considérer la robotisation comme une évolution logique, qui doit permettre d’améliorer encore la précision et l’efficacité des travaux.
« Ceux qui ont déjà touché à la robotique en élevage sont plus ouverts sur cette question, relève Gauthier Savalle. Paradoxalement, c’est chez les plus jeunes qu’on a noté le plus de réticences. » Les personnes interrogées ont évidemment aussi pointé l’intérêt d’automatiser les tâches répétitives afin de se dégager du temps pour des activités plus complexes, ou pour répondre, même ponctuellement à des problèmes de main-d’œuvre. Le tout en facilitant aussi l’accès aux fenêtres météo permettant les interventions…
Réglementation, attelage et temps de préparation
Mais tout le monde a bien conscience qu’un robot dans les champs, cela n’a rien d’évident. Les interrogations sur la surveillance, la programmation et la gestion des bugs et alertes arrivent en premier. « Le bornage du parcellaire est évidemment chronophage au début, poursuit Gauthier Savalle. Mais c’est important d’y passer du temps pour éviter les accidents. Souvent, il est fait par le concessionnaire. » La relation avec ce dernier s’annonce essentielle pour les agriculteurs enquêtés, pour gérer le SAV : il lui faudra de la réactivité, des compétences et une certaine proximité.
Du côté de la Fédération des Cuma, d’autres préoccupations ont été soulevées. Tous les parcellaires, sont-ils accessibles ? Comment gérer le transport des robots ? Et leur partage en Cuma ? Quels freins réglementaires peuvent se poser ? (par exemple pour le travail des outils durant la nuit ou simplement pour traverser une route). Pour les tracteurs autonomes, il s’agit de vérifier la compatibilité des outils attelés… « Il existe déjà, par exemple, des déchaumeurs avec des capteurs de bourrage. Mais comment adapter cette technologie à des tracteurs sans chauffeurs ? Comment faire la liaison avec le robot ? Et il faudra bien sûr programmer des protocoles en cas d’alerte émise par les capteurs sur les outils, afin d’éviter une intervention humaine. »
Confronter la technologie à la réalité du terrain
Pour répondre à ces questions et donc amener peu à peu les robots à se confronter à la réalité du terrain, les Cuma de Normandie et de l’Ouest lancent leur réseau dans une nouvelle phase. Un premier partenariat est ainsi lancé avec AgXeed, le constructeur de robots-tracteurs autonomes (les AgBot).
L’outil sera mis en service auprès d’agriculteurs du réseau, sur le terrain, ce qui permettra d’en mesurer la pertinence, et de déterminer les schémas organisationnels les plus adaptés. « Et bien sûr, nous quantifierons les gains de temps et d’efficacité dans un cadre opérationnel, poursuit Gauthier Savalle. Notamment pour mesurer le temps consacré à la surveillance – nécessaire ou non - du robot. Tout le monde n’est peut-être pas prêt à laisser un robot tourner tout seul dans ses champs… »•
Un robot ou des robots ?
Si les premiers robots des champs comme le Farmdroïd sont totalement autonomes, les constructeurs travaillent désormais à séparer la traction de l'outil. C'est ce qui a conduit Amazone à entrer au capital de la start-up AgXeed et à pousser son déchaumeur Cenio vers une totale autonomie. En effet, le système AutoTill, règle le déchaumeur automatiquement tout en assurant une surveillance des fonctions de la machine, grâce à une liaison Isobus. Un système qui, a minima, permet une bonne information du chauffeur et qui peut être poussé à son maximum combiné à un AgBot. AutoTill va en effet gérer tous ses réglages seul et, en cas de problème, indiquer au robot la façon de le résoudre.