Après un an de test, quels retours sur l'appli Aptimiz ?
Dans le cadre du Programme de développement agricole et rural, les Chambres d'agriculture de Normandie testent les nouveautés pour améliorer l'organisation du travail dans les fermes. Six exploitations ont testé l'application Aptimiz. Voici leur analyse.
Dans le cadre du Programme de développement agricole et rural, les Chambres d'agriculture de Normandie testent les nouveautés pour améliorer l'organisation du travail dans les fermes. Six exploitations ont testé l'application Aptimiz. Voici leur analyse.
Aptimiz est une application mobile conçue pour mesurer automatiquement le temps de travail des agriculteurs sans nécessiter de saisie manuelle. Grâce à la géolocalisation et à la détection des mouvements, l'application identifie et enregistre les activités réalisées sur l'exploitation.
Elle permet d'analyser la répartition du temps de travail par atelier (élevage, cultures, administratif, etc.) et d'obtenir des indicateurs précis sur la rentabilité horaire et l'efficience des pratiques agricoles. Son fonctionnement repose sur un paramétrage initial de l'exploitation, incluant la cartographie des différentes zones de travail (bâtiments, parcelles, ateliers). Une fois activée, l'application suit automatiquement les déplacements et les tâches effectuées, générant des tableaux de bord accessibles sur ordinateur et smartphone.
Des données précises sur la répartition du temps de travail
Les Chambres d'agriculture ont équipé six exploitations pendant un an afin d'étudier l'ergonomie, la précision des données et l'impact sur l'organisation du travail de cette application. Grâce à la quantification précise du temps de travail par atelier, les exploitants ont une meilleure visibilité sur la répartition de leurs activités. Il devient ainsi plus facile de calculer la rentabilité horaire et d'identifier les tâches les plus chronophages. " Nous nous étions fixés un temps de travail maximal par semaine de 35 heures pour Valérie, et 55 heures pour moi, explique Gildas Gédouin, éleveur avec sa femme à Servon (50). Cette expérimentation a permis de voir que nos objectifs étaient atteints mais elle a amené de nouvelles questions. Par exemple, la circulation dans l'exploitation qui n'est pas optimale ou encore le temps perdu dans les trajets. Nous avions réfléchi à un système de marche en avant, et cela confirme son utilité. Par ailleurs, nous constatons que le temps passé sur nos céréales est trop élevé. Nous allons sûrement faire le choix de la délégation de travaux pour le réduire ".
Un outil pour rationaliser ses besoins de main-d'œuvre
L'application aide à mieux dimensionner les besoins en délégation et en embauche, facilitant ainsi la prise de décision en matière de gestion des ressources humaines.
Par ailleurs, en objectivant le volume de travail nécessaire à chaque tâche, l'outil peut aussi constituer un atout dans le cadre d'une transmission d'exploitation. " Nous envisageons de souscrire une année de plus à Aptimiz pour avoir un comparatif sur deux ans et voir si ce que nous avons mis en place a un impact positif. Nous estimons que cela est un atout pour la transmission, car un EBE (excédent brut d'exploitation) est une chose, mais il faut voir à quel prix humain on l'obtient ! ", souligne le couple Gédouin.
Des contraintes techniques et des résistances psychologiques
Toutefois, l'utilisation d'Aptimiz présente certaines limites. La consommation élevée de batterie sur certains modèles de téléphones, rend parfois difficile une utilisation continue sur la journée. Et si l'outil se veut automatique, certaines données nécessitent un recalibrage manuel pour garantir leur exactitude, ce qui peut ajouter une contrainte supplémentaire aux exploitants. Enfin, le défi majeur réside dans l'acceptation de l'outil par les salariés : certains ont exprimé des réticences, percevant son usage comme une forme de surveillance.
Conditions à réunir avant de se lancer
Pour tirer pleinement parti de l'application Aptimiz, plusieurs éléments apparaissent comme déterminants :
avoir une problématique clairement définie, car cela détermine l'assiduité dans le temps. Les agriculteurs en attendent des réponses précises ;
un suivi régulier des enregistrements est indispensable pour garantir des résultats exploitables ;
la cartographie des zones d'intérêt lors de l'installation doit être précise pour éviter le recalibrage manuel ;
la performance du téléphone. Disposer d'un smartphone performant et à jour est recommandé ;
l'implication des salariés dans l'utilisation de l'outil exige une communication adaptée. Faire preuve de pédagogie permet aux salariés de percevoir l'outil comme une aide à l'organisation plutôt qu'un outil de traçage.
La technologie n'est pas magique
Sur les six exploitations du départ, deux ont rencontré des difficultés techniques ou manqué d'assiduité dans la collecte d'informations. Quatre ont pu fournir des données exploitables et répondre à leur questionnement de départ. Il ressort un bilan positif de leur expérience. Les exploitants ont pris du recul sur leur situation en se basant sur des chiffres percutants, vecteurs de changement. Cependant, pour que l'expérience ait du sens, la technologie n'est pas magique, il faut la suivre ! •