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Communication engrais de la Commission : un coup d’épée dans l’eau

Face à la crise sur le marché des engrais et aux demandes d’action des agriculteurs et des législateurs, la Commission européenne a publié le 9 novembre une communication intitulée “Assurer la disponibilité 
et un prix acceptable des engrais”. Voici les dessous d’une opération ratée portant lourdement préjudice aux agriculteurs et que l’AGPB dénonce ici.

épandeur d'engrais dans un champ
© Réussir

Le texte de cette communication énonce principalement des objectifs à long terme pour l’Europe et le reste du monde. Pour faire face à la crise, il se contente de renvoyer la balle aux États membres, autorisés à subventionner les industriels et les agriculteurs. Un grand coup d’épée dans l’eau alors qu’il est urgent de faciliter les importations et la logistique des engrais pour détendre les prix et fluidifier le marché.
La crise sur l’approvisionnement en engrais a commencé en 2021, et les livraisons d’engrais en France pour la récolte 2022 ont baissé de - 8 % pour l’azote, - 23 % pour le phosphore et - 24 % pour la potasse. La situation s’est encore aggravée depuis la guerre en Ukraine, qui a conduit à la fois à une explosion des prix et à une baisse de la production et des importations d’engrais azotés en Europe. La campagne d’approvisionnement actuelle accuse un net retard depuis juin, ce qui compromet la récolte attendue en 2023. Face à cette crise et aux demandes d’action des agriculteurs et des législateurs, la Commission européenne a publié le 9 novembre une communication de 20 pages intitulée “Assurer la disponibilité et un prix acceptable des engrais”.
Ce texte frappe d’abord par l’importance accordée à l’aide aux pays en situation d’insécurité alimentaire qui occupe la moitié du texte. La situation sur le marché européen ne fait l’objet d’aucune analyse, la communication y énonce principalement des objectifs à long terme : améliorer la transparence du marché et promouvoir la baisse de la consommation d’engrais, un meilleur accès aux fertilisants organiques et recyclés et la fabrication d’ammoniac basé sur de l’hydrogène “vert”, ceci au moyen d’une révision des Plans stratégiques nationaux (PSN) de la Pac, d’un effort de recherche et du plan d’action pour une gestion intégrée des nutriments annoncé pour début 2023.

Pas d’action de nature à faire baisser les prix

Mis à part le rappel de la proposition publiée en juillet de suspension des droits de douanes à l’importation d’ammoniac et d’urée, actuellement en examen par le Conseil européen, les seules mesures proposées pour faire face à la crise actuelle sont la possibilité, très hypothétique, d’utiliser les 450 M€ de la réserve agricole européenne de crise, et les aides d’État sur les budgets nationaux, c’est-à-dire les subventions aux fabricants d’engrais et aux agriculteurs européens.
Aucune action concrète n’est donc proposée qui soit de nature à faire baisser les prix des engrais ou à améliorer leurs disponibilités dans l’immédiat. Avec un renvoi de la patate chaude aux États membres, autorisés à subventionner les producteurs et les consommateurs, ces mesures qui ignorent le fonctionnement du marché, seraient coûteuses pour les budgets nationaux et créatrices de fortes distorsions entre les pays capables de les financer, comme l’Allemagne, et les autres.

Les professionnels ont proposé un ensemble de mesures d’urgence totalement ignoré

Les agriculteurs français et européens proposent pourtant depuis plusieurs mois un ensemble de mesures d’urgence pour résoudre la crise sur le marché des engrais qui auraient un effet immédiat de baisse des prix et d’augmentation des disponibilités, notamment à l’importation comme :
- suspendre ou supprimer les droits de douane européens à l’importation d’azote (6,5 % sur les engrais azotés) ;
- assurer le bon fonctionnement du marché européen ;
- inciter distributeurs et agriculteurs à acheter à l’avance et à gérer les risques de prix ;
- soutenir les industriels européens et supprimer les droits à l’importation d’ammoniac ;
- faciliter la logistique portuaire à l’importation et le transport routier intérieur ;
- sécuriser les sources d’importations alternatives et substituer temporairement de l’urée et de la solution azotée aux ammonitrates ;
- mettre fin aux incohérences politiques dans l’application des sanctions russes aux importations ;
- procéder aux assouplissements règlementaires nécessaires (Reach, règlement UE n° 2019/1009…).
Les agriculteurs et les distributeurs d’engrais avaient pourtant rappelé ces priorités quelques jours avant la publication de la Communication. Force est de constater que la Commission européenne frappe un grand coup d’épée dans l’eau. C’est aussi le point de vue des députés du Parlement européen qui, en séance plénière le 11 novembre, ont souligné à la fois l’absence de financement européen et la nécessité de lever les barrières tarifaires à l’importation des engrais. 
Les agriculteurs, et notamment les producteurs français de grandes cultures, sont fortement mobilisés sur ce dossier stratégique et continueront à alerter les autorités sur le risque de pénurie d’engrais et les mesures d’urgence de facilitation des importations et de la logistique, nécessaires pour détendre les prix et fluidifier le marché des engrais. • 

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