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« Il faut tout faire pour sauver le soldat Noël ».

Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, alerte l’opinion sur les filières mises en difficulté avec le confinement. La souveraineté alimentaire est un enjeu à relever, pour le syndicat majoritaire.

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© ACTUAGRI

Les agriculteurs vivent comme beaucoup de Français, leur deuxième période de confinement. Quel est aujourd’hui leur état d’esprit ?

Les agriculteurs poursuivent leur activité liée au vivant et aux saisons, une activité essentielle : produire pour nourrir les populations. D’ailleurs, toute la chaîne alimentaire ne cesse de travailler et reste entièrement mobilisée. Producteurs, artisans, transformateurs, transporteurs, distributeurs… sont tous sur le pont ! Si des tensions avaient pu exister sur certains produits de base comme les pâtes, la farine, le riz en mars dernier, aujourd’hui nous ne constatons aucune rupture car les agriculteurs et le secteur agroalimentaire ont démultiplié leurs efforts pour être au rendez-vous.

 

Beaucoup de secteurs étaient en tension lors du premier confinement : horticulture, viticulture, filière cidricole, pommes de terre … Qu’en est-il aujourd’hui ? D’autres secteurs sont-ils ou risquent-ils d’être touchés ?

Oui. A l’approche des fêtes de fin d’année, nous sommes inquiets pour nombre de nos activités en particulier celles en lien avec la restauration hors domicile (RHD) et les produits festifs. La fermeture des bars et des restaurants pénalise, une fois de plus, le secteur viticole, de la bière et du cidre ainsi que celui de la viande : les entrecôtes, les filets, mais aussi les canards, la pintade, les pigeons et les cailles perdent d’importants débouchés avec la fermeture des restaurants. Pour le secteur horticole, c’est un terrible coup dur, même si nous sommes parvenus à sauver l’ouverture des fleuristes et des jardineries pour le week-end de la Toussaint. Le compte n’y est pas. Le secteur a perdu plus de 4 000 emplois depuis mars et quand les fleuristes faisaient 30 bouquets par jours en fleurs coupées, ils n’en font plus que trois ou quatre en « click & collect ». La vente des fleurs qui a été interdite en grande surface est également très pénalisante. La FNSEA cherche des solutions avec les distributeurs et les collectivités locales pour des opérations de solidarité auprès du personnel sanitaire et social, en particulier pour saluer le travail réalisé avec beaucoup d’abnégation par le personnel hospitalier. Nous poussons aussi à la finalisation du plan d’aide pour les pertes du printemps qui tardent beaucoup trop.

 

Quels enseignements avez-vous tiré de la pandémie du Covid-19 ?

Les enseignements du premier confinement nous ont permis de négocier le maintien des marchés de plein vent et des marchés couverts. Nous avons aussi négocié le maintien de la chasse au grand gibier et aux nuisibles pour éviter l’amplification de dégâts aux cultures. Notre action a aussi permis de pérenniser toutes les autorisations de circulation pour les agriculteurs et les acteurs de la filière agroalimentaire et de mettre en place un protocole pour permettre aux licenciés de clubs équestres d’accéder aux chevaux et poneys de club. Certes, le fait que les cantines scolaires restent ouvertes permet de limiter les dégâts par rapport au premier confinement. Néanmoins, les stocks commencent à s’accumuler comme pour le canard : 12 000 tonnes. La pintade a vu sa consommation chuter de 15 % ces dernières semaines. Or pour les volailles festives, cette période de fin d’année est cruciale : 75 % des ventes de foie gras s’effectuent sur seulement trois semaines. Il en est de même pour les oies, les chapons, le petit gibier. Tout l’enjeu est que le consommateur puisse anticiper ses commandes. En effet, commander comme souvent les cinq derniers jours avant Noël ou le 1er de l’An constitue un stress supplémentaire pour les producteurs. Citons aussi les bouchers et les industriels qui ont pris des initiatives pour réaliser des conditionnements adaptés aux familles plus petites.

 

Y a-t-il assez d’achats français ?

Bien entendu, nous poussons à l’achat de produits français dans tous les appels d’offre pour la restauration collective. Le décret du 23 juillet qui relève à 100 000 euros le seuil de dispense de procédure pour la passation des marchés publics pour l’achat de denrées alimentaires produites, transformées et stockées pendant l’état d’urgence sanitaire prend fin au 10 décembre. Il serait opportun que le Gouvernement le prolonge au-delà de 2020. La formule peut paraître un peu cavalière à mais elle résume bien l’état d’esprit des agriculteurs et de la filière agro-alimentaire aujourd’hui : « Il faut tout faire pour sauver le soldat Noël ».

 

La souveraineté alimentaire que porte la FNSEA est-elle une des réponses à cette crise ?

Evidemment. C’est un dossier majeur pour la défense de nos agriculteurs. C’est une partie importante de notre identité. A travers cette souveraineté, nous souhaitons pouvoir relocaliser une partie des productions qui sont en déficit chronique, pour lesquelles les agriculteurs disposent d’un réel savoir-faire et que notre pays est en capacité de produire. Est-il normal que nous importions 56 % de notre viande ovine, 60 % de nos volailles (80 % de nos poulets standards), 70 % de nos fraises, 70 % du vin en vrac, 74 % de notre raisin de table ? Est-il normal que nos importations de fromages aient augmenté de 40 % depuis 2011 ? Regagner notre capacité productive avec des agriculteurs nombreux, qui gagnent leur vie décemment et peuvent répondre à tous les besoins est l’objectif cardinal de notre ambition de souveraineté alimentaire solidaire. Celle-ci ne saurait se construire sans logique de croissance durable : cet engagement nécessite aussi que les décideurs politiques permettent aux agriculteurs de vivre dignement de la vente de leur production afin de concilier activité économique et transition écologique. Sans double performance économique et environnementale, point de salut !

 

Dans ces temps difficiles, le rôle des distributeurs est tout aussi important. Qu’attendez-vous d’eux ?

Ils sont incontournables car ils vendent 73 % des achats alimentaires. Ils ont donc une responsabilité alimentaire. Je sais le leur rappeler régulièrement. Certains ont vraiment joué le jeu lors du premier confinement en mettant en avant des produits français et en contractualisant sur des volumes d’engagement ou en payant au jour de livraison les entreprises de petite taille. Mais il nous revient que les négociations commerciales qui démarrent partent encore sur une baisse des prix aux industriels. Ce n’est pas acceptable. Les ministres doivent taper du poing sur la table. La FNSEA a demandé la tenue, très prochaine, d’une réunion du Comité de suivi des relations commerciales.

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